15 mai 2012

Le 1er gouvernement de François II – 24e président de la France et 7e président de la Ve République française

Le nom du Premier ministre ne fait plus de doute après « la gaffe », dixit Ségolène Royal, de Jean-Pierre Jouyet ce jour au micro de RTL : il s’agit comme annoncé dans la presse depuis l’élection de François Hollande le 6 mai 2012 de Jean-Marc Ayrault, l’actuel maire de Nantes, Président de l’agglomération nantaise et Président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale depuis 15 ans (il briguera en juin son 6e mandat de député - sic), un cumulard donc, dont on attend avec impatience la loi sur la modernisation de la vie publique et le non-cumul des mandats.
Tire sur mon doigt

A son crédit pour être nommé à ce poste, signalons sa collaboration depuis 15 ans avec François Hollande (quand Jospin devint Premier Ministre, l’un devient premier secrétaire du Parti socialiste, l’autre Président du groupe PS et les deux siègent ainsi côte à côte 15 ans lors des réunions de groupe du mardi matin, où la ligne politique sur les grands textes de lois et les orientations stratégiques sont arrêtées). Et les deux se sont toujours trouvés complémentaires.
A son crédit bis, une grande expérience du fonctionnement de l’Assemblée nationale qui facilitera les relations entre le gouvernement et le Parlement pour mener à bien d’importantes réformes dès le début du quinquennat. Les propositions socialistes qu’il a élaborées pendant les dix années d’opposition sous forme de proposition de loi1 et d’amendement ont largement alimenté le programme socialiste.
Voir la gueule de Tokyo Hotel fait toujours plaisir
Son plus bel atout vient surtout du fait que le bougre est bilingue, il parle allemand. Alors au moment de renégocier un traité européen avec l’Allemagne, mener les discussions dans la langue de Tokyo Hotel ne pourra pas faire de mal.
Et puis sa nomination permettra enfin un renouvellement du personnel politique à Nantes, car cela fait 23 ans que plusieurs adjoints doivent ronger leur frein à pour prendre sa succession.

Malheureusement, Jean-Marc Ayrault traîne aussi quelques boulets : on attend avec impatience de le voir se confronter à ses ministres écologistes (Cécile Duflot ou Yannick Jadot, ministre de l’écologie) sur la construction du nouvel aéroport de Nantes, à Notre-Dame-des-Landes ; il en était l’initiateur, l’arrêt de sa construction était dans le programme d’Eva Joly.
On attend également les refrains de l’UMP sur sa condamnation à 6 mois de prison avec sursis en 1997 dans une affaire de marché public attribué en 1989 pour la publication du journal municipal de Nantes : une condamnation en tant que Maire, il y aurait eu favoritisme, mais pas d’enrichissement personnel ou de détournement d’argent – comme il le clame, il a depuis été réélu deux fois à la Mairie de Nantes, mais c’est bien connu, les Français sont des veaux.

En fait le plus gros désavantage de Jean-Marc Ayrault, c’est que s’il est nommé à Matignon, Martine Aubry ne l’est pas. Or, elle était sollicitée par l’opinion. Or, elle a fait une campagne de terrain très importante. Or, elle a rassemblé l’ensemble du parti socialiste derrière François Hollande après les primaires (bien que sur ce point il semble que ce soit François Hollande lui-même qui ait réussi à faire l’unanimité autour de ses thèmes de campagne la jeunesse et la justice, et de son style de présidence).
Et puis, il aurait été bon, si la France continue à se complaire dans un exécutif bicéphale (contrairement à tous les autres régimes démocratiques ; même François Fillon souhaitait en 2005 la suppression du poste de Premier Ministre), que l’une des têtes soit celle d’un homme, l’autre celle d’une femme. Elle incarnait les 35 heures, la dernière grande avancée sociale française, même si la manière dont elle a mis en place cette réforme reste critiquée.
Edith Cresson, seule femme Premier Ministre de la France, l'image est malheureusement désormais un brun vintage.

Mais parlons peu parlons bien, il ne faut pas se leurrer, Martine Aubry et François Hollande ne peuvent vraiment pas se voir, et l’épisode gauche molle de la primaire socialiste était du petit lait pour la droite qui aurait pu faire pas mal de dégâts. Bien sûr, elle aurait réussi à regrouper autour d’elle l’ensemble des socialistes, aurait donné des gages au Parti de Gauche et à JLM. Pourtant ça ne l’a pas fait.

Se pose maintenant un problème pour François Hollande et J-M Ayrault : dans quel ministère nommer Martine Aubry ? On évoque un grand ministère de l’éducation nationale, de la culture (et il est vrai que le dynamisme culturel lillois témoigne d’une grande compétence sur le sujet), et de la jeunesse. Mais on voit mal comment le Ministère de l’Education nationale pourrait échapper à Vincent Peillon, et le Ministère de la Culture à Aurélie Fillipetti.
Et si l’hypothèse la plus probable était qu’elle n’entre pas au gouvernement, et qu’elle reste à la tête du parti socialiste, ce qui l’associerait de fait à l’ensemble des réformes que mènera le futur gouvernement ? Elle a prouvé d’importantes capacités à ce poste depuis 2009 et le congrès dévastateur de Reims, alors ses compétences seront nécessaires quand il faudra mener la bataille des élections locales en 2014, où après d’importantes victoires la gauche abordera de nouveau ces échéances en étant au pouvoir au niveau national.

Autre hypothèse : si tout simplement Martine Aubry n’en avait pas envie, de ce poste de 1er ministre ? Pas envie parce que c’est François Hollande (dans l’hypothèse DSK, elle semblait prête à y aller), pas envie parce qu’elle ne veut pas quitter sa place de Maire et de Président d’agglomération à Lille où elle n’est pas installée depuis 23 ans, pas envie comme le laissait présager son refus d’obstacle – elle ne se présente pas aux législatives après un échec douloureux en 2007 à Lille, or on imagine mal un Premier ministre sans cette légitimité du scrutin nationale (tous les premiers ministres de la IVe et de la Ve République – je n’ai pas remonté plus loin mais ça doit être vrai avant aussi - étaient des parlementaires, à l’exception de Gaulle quand il est rappelé en 1958, mais il bénéficiait d’une autre légitimité historique, et a obtenu la sienne par les scrutins très rapidement après). On se souvient de l’épisode Juppé en 2007, nommé au ministère de l’écologie et du développement durable, taillé à sa mesure, pensé par et pour lui, et qui doit quitter son poste après son échec aux législatives, dans sa ville, à Bordeaux, face à Michelle Delaunay.

A l’inverse, Jean-Marc Ayrault lui montre qu’il a envie, mène campagne auprès de François Hollande et de ses conseillers. Il a mené la campagne des présidentielles en se mettant dans cette posture de 1er ministre, en répétant un discours rodé sur les mesures à prendre rapidement, un entraînement au fameux discours de politique générale prononcé devant l’Assemblée après la nomination du Premier Ministre. Depuis des semaines, il écrit des notes sur le programme des premières semaines et le calendrier de la première année, et participe à la rédaction des décrets qui seront publiés cette semaine ou la semaine prochaine, d’abord sur la retraite à 60 ans bien sûr, mais aussi, c’est le boulot d’un premier ministre, sur l’organisation de l’administration, le découpage des ministères et des grandes directions de l’administration centrale de l’Etat et leurs rattachements.

L’hypothèse Valls était une farce, soyez-en sûr, à la limite en deuxième premier ministre à mi-mandat s’il fait ses preuves au ministère de l’intérieur, mais l’expérience Fillon-Sarkozy montre que sauf accident, dans cette formule quinquennat, le tandem sera le même pendant cinq ans.

            Avant midi demain retrouvez sur Combats de coqs en exclusivité l’annonce du futur gouvernement paritaire, paritaire on a dit, va plus falloir déconner avec ça les gars.


1On parle de proposition de loi quand le texte émane du Parlement et de projet de loi quand le texte initial a été rédigé par le Gouvernement – pour briller en société...

Pour découvrir en exclu l'ensemble du gouvernement :
Voir la partie 1 : ceux pour qui c'est sur
Voir la partie 2 celles pour qui ça devrait le faire
Voir la partie 3 : les incertitudes

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